Cette fin de saison fut chargée en émotion. Après une belle progression dans la Club 2 GP tout au long de l'année il restait un tout dernier concours de dressage dans le département avant les Championnats de France. Naturellement je me suis engagée car je sentais que depuis le dernier concours on avait encore progressé, qu'on avait peaufiné certaines choses ainsi je voulais vraiment présenter aux juges notre reprise.

Ce jour-là il pleuvait comme jamais... un temps à rester au chaud sous la couette et dans le box. Mais rien n'aurait pu freiner mon optimiste, toutefois dès 7h du matin je pris soin d'appeler le club pour réserver un box afin que Fischer ne passe pas la journée attaché au camion sous la pluie et l'orage. Par chance il en restait un seul, les autres ayant été réservés par les cavaliers des épreuves amateurs.

9h, Fifi grimpe dans le camion le plus naturellement du monde, on traverse les Chambarans, une route de montagne fatigante pour les jambes des chevaux car ça tourne beaucoup, ça monte, ça descend... malgré tout Fifi ne bronche pas. On arrive et on file vite dans le box, entre deux chevaux d'épreuves amateurs je me sens un peu petite mais parfaitement motivée.

Par chance la détente se déroule dans le manège, bonne ambiance comme je l'aime tant en dressage, personne qui crie, chaque cavalier dans son coin travaille son cheval, j'étire les antérieurs, trouve un plot pour me mettre en selle et je commence la détente toute seule. Je m'estime totalement débutante et souvent en présence de cavaliers avec leur coach je perds confiance en moi, alors je me mets dans ma bulle et je fais un maximum confiance à mon ressenti et en mon petit cheval qui ne me déçoit jamais.

Le temps de quitter le manège et d'attendre mon tour à côté du rectangle de dressage pour la Club 3 Grand Prix je suis trempée jusqu'au soutien-gorge, l'horreur ! Mais une fois rentrée en piste tout disparait, la pluie, le monde, le trac... on déroule comme on peut, la piste est très profonde et freine un maximum Fischer, je suis obligée de le mettre en avant à chaque foulée et cela me fatigue énormément, toutefois nous réalisons une reprise propre et sans grosse faute malgré un trot assis désastreux !

Nous avons ensuite une bonne pause avant la Club 2 Grand Prix, le temps de manger un morceau au chaud dans le camion, Fifi quant à lui est dans son box à l'abris, il mange son foin et ses carottes. Mais je n'ai pas l'appétit, le stress est là et ne me quittera plus... Dans ma reprise nous sommes 12 et beaucoup de cavaliers déroulent également la Club 1 Grand Prix, bien que je passe en première je les vois se préparer et les observe à la détente, personne en gogue, tous en bride ! Les cavaliers montent bien, les chevaux ont l'air de bien connaitre leur travail et les coachs sont présents. 

Ce que je vise aujourd'hui ? La première place ! L'idée n'est pas de monter sur la première marche du podium avec prétention, non pour moi la victoire représente tellement d'heures de travail à pied comme en selle, tellement de sacrifices, de doutes, de joie, d'investissement. La victoire c'est la récompense de savoir qu'on a plu aux juges et qu'on travaille dans le bon sens. Mais aussi la fierté d'offrir cette victoire à la propriétaire de mon petit cheval.

La détente se passe bien mais je manque de temps hélas car j'ai mal géré ma préparation, toutefois Fifi comme moi nous sommes fatigués donc je relative en pensant que c'est un mal pour un bien de ne pas trop en faire, je sors du manège et la pluie s'arrête enfin, mais depuis le matin et les nombreux passages la piste est vraiment catastrophique et je sais que ça va être difficile, l'orage gronde, le vent fait claquer les bâches et banderoles de part et d'autres de la carrière, conditions difficiles mais on y va et on donne tout ! 

Je suis épuisée et je vais chercher au fond de moi les dernières énergies restantes, Fifi se freine sur la piste et je ne sens plus mes jambes pour trotter assise correctement et le remettre en avant, après la seconde ligne courbe je suis tellement à bout que je l'abandonne deux secondes et il repasse au trot ( faut dire aussi que la sortie se situait juste derrière la lettre de retour sur la piste donc incompréhension pour lui à ce moment là ) je repars deux foulées plus tard au galop et j'ai juste envie de pleurer, je comprends que la première place vient de m'échapper mais je me reprends en me disant qu'il faut impérativement que je donne tout pour gagner des points ailleurs. Doublé final, salus aux juges en C et en B et je relâche la pression, les larmes sont là, un mélange de déception pour cette transition volée et en même temps la joie d'avoir une fois de plus vécu ce moment là avec mon petit cheval.

Je quitte la piste en lui faisant de gros câlins, je l'aime tant c'est fou ! Je m'occupe de lui, le masse, le sèche, lui met sa couverture polaire et lui redonne du bon foin. Il est dans son box serein et moi je m'installe au bord de la carrière pour voir tous les concurrents. Je suis lucide, je suis passée première, j'ai manqué d'activité, j'ai fais une très grosse faute, j'ai pas vraiment réussi à trotter assise, j'étais en gogue et petit détail j'étais la seule à poney. Mon époux et ma mère présents ce jour là regardent avec intérêt les autres cavaliers et on établi un classement qui se vérifiera à la remise des prix...

La remise des prix arrive, à ce moment là j'ai honte et j'espère que sur les 12 je suis au moins dans les 5 premiers... Mon époux me propose d'aller voir le classement définitif accroché au tableau, je refuse, je préfère apprendre ma place au micro c'est moins décevant que sur papier. Lui il ne se gene pas pour y aller et en revenant il me demande où je pense me situer, je lui dis 4ème ou 5ème, il me dit le plus sérieusement du monde " tu n'es pas 4ème ni 5ème mais tu n'es pas 1ére non plus ". Je suis tellement déçue, car pour moi il est évident que je ne peux pas avoir fait mieux que ces places là, donc impossible que je sois 2ème ou 3ème. Le coeur lourd j'attends, la voix résonne dans le micro " A la première place nous avons Anaïs Albertino et Fischer Price " je m'effondre totalement et laisse éclater ma surprise en pleurant comme une enfant de 8 ans ! La suite du classement est exactement comme je l'avais fait dans ma tête, je suis vraiment stupéfaite d'être passée devant ces cavalières que j'ai trouvé si élégantes, voyant mon émotion elles me félicitent toutes sincérement et s'empressent de quitter le podium pour rejoindre la détente de la Club 1 Grand Prix, moi je croise le regard de ma mère qui pleure encore plus que moi et mon époux qui a les yeux qui brillent, c'est reparti pour une coulée de larmes dans leurs bras. 

Je conçois que cela est juste une Club 2 Grand Prix, mais chaque victoire est purement personnellement et personne ne peut en comprendre réellement l'impact et le sens. Pour moi c'est une merveilleuse fin de saison, une victoire sur moi même, sur mon passé et surtout une aventure extraordinaire que je partage avec un cheval qui me donne tout, les victoires c'est lui qui va les chercher, si j'en suis là c'est grâce à lui donc cette victoire me rend heureuse pour lui car c'est un cheval vraiment incroyable qui mérite de briller sur les podiums !

 

C'est donc sur une double victoire que nous terminons cette saison très très instructive ! J'en garde des souvenirs merveilleux, un vrai bonheur à chaque concours mais surtout tous les jours à la maison en vivant à ses côtés ! En vidéo retrouver le résumé de cette journée mémorable :
 

 


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